4 – Renforcer la dynamique groupale

La dynamique groupale s’entend comme l’ensemble des interactions et des processus psychologiques qui se produisent au sein du groupe de participant·es et de formateurs ou formatrices. Ces interactions et ces processus influencent le comportement des participant·es, en particulier leur engagement dans les activités pédagogiques.

Une démarche participative
Dans le champ de la promotion de la santé, les actions sont inscrites dans une démarche participative. La participation « a comme objectif principal de permettre aux populations d’avoir accès à une citoyenneté complète, de prendre part à des décisions les concernant et de devenir actrices de leur vie » (Sachs, 2006). Cela signifie que le groupe est impliqué au maximum dans les décisions qui le concernent. 

Une dynamique collective permet de renforcer la motivation des participant·es par : 

  • le transfert d’émotions positives dans le groupe, telles que la joie, l’amusement, l’excitation, le plaisir, la curiosité, l’intérêt, l’envie… 
  • la satisfaction des besoins de reconnaissance et d’appartenance à un groupe, qui permet de rompre le sentiment d’isolement 
  • le soutien et la valorisation des autres participant·es, qui contribuent au sentiment de compétence et de valorisation du groupe 

Elle vise à enrichir la formation avec les savoirs et les expériences de chaque individu et favorise l’entraide, notamment pour résoudre des problèmes rencontrés en situation de travail. Elle permet enfin de soutenir le processus de déplacement des représentations en intégrant d’autres points de vue.

Les étapes de la dynamique de groupe 

Ce tableau présente les cinq étapes de la dynamique de groupe selon le modèle de Tuckman et Jensen (1977) et les actions que le formateur ou la formatrice peut entreprendre pour soutenir chaque étape. 

Tableau : Les étapes de la dynamique de groupe

Les caractéristiques du groupe

La dynamique groupale dépend de certaines caractéristiques du groupe. Le tableau suivant liste les caractéristiques repérées par Mucchielli (1965) et Abric (1999), auxquelles ont été associées des actions pouvant être mises en place par le formateur ou la formatrice pour les étayer. 

Tableau : Les caractéristiques d’un groupe 

Retenons que, quel que soit le modèle, le groupe passe par différentes étapes et a des caractéristiques et des besoins dont il est important de tenir compte pour favoriser la réussite de la formation. 

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1 – Poser un cadre sécurisant

Qu’est-ce que le cadre ?

La notion de « cadre » au sein d’un dispositif de formation peut comprendre des aspects variés de la formation en fonction du modèle théorique choisi. Nous considérerons qu’elle englobe ces aspects : 

  1. Le cadre institutionnel et pédagogique : l’intention de la formation, le programme, les méthodes d’évaluation, l’engagement contractuel… 
  2. L’environnement physique : les espaces de travail, les lieux de la formation (sanitaires, espace extérieur…), le caractère confortable et convivial de la salle de formation… 
  3. L’enveloppe groupale : le profil des participant·es, les règles de fonctionnement du groupe, les interactions entre les participant·es et le formateur ou la formatrice…  
  4. Le formateur ou la formatrice est non seulement garant·e du cadre, mais il ou elle fait également vivre les règles en les incarnant par sa posture : une attitude bienveillante, de l’écoute et de la disponibilité, le respect des horaires et des pauses… Il ou elle s’adapte en fonction de la dynamique du groupe et de la progression des apprentissages. On oublie trop souvent que la confiance qu’entretient le groupe vis-à-vis du formateur ou de la formatrice, de ses connaissances et de sa capacité à transmettre font partie intégrante et modèlent le cadre de la formation.  

Pourquoi poser un cadre ?

Le cadre incite à faire sens ou culture commune, tout en respectant les limites de chaque personne. Il pose les conditions nécessaires à la satisfaction des besoins individuels des participant·es, des formateurs et formatrices, et les engagent à les respecter collectivement. Il favorise le sentiment de plaisir et de partage.

Le cadre répond au besoin de sécurité des participant·es et des formateurs et formatrices en instaurant un climat de confiance et en assurant de bonnes conditions pratiques.

Comment et quand poser un cadre ?

Observons à présent les moments successifs pendant lesquels il est possible de poser le cadre.

A l’arrivée des participant·es
  • Soigner l’arrivée : un accueil soigné peut se traduire par des choses aussi simples qu’une attitude disponible et avenante, un sourire, des salutations et quelques phrases d’accueil : « Avez-vous fait bonne route ? », « Avez-vous rencontré des difficultés pour trouver le lieu de la formation ? »… Cet accueil passe aussi par la mise à disposition d’un espace de collation (café/thé, biscuits, fruits secs, fruits…) et, pourquoi pas, par un fond musical qui peut remplir des silences vécus comme étant gênants quand le groupe ne se connait pas. 
  • Personnaliser l’arrivée : un accueil individuel au sein du collectif est important. Il peut consister à simplement proposer de poser ses affaires et d’écrire son prénom (écriteau, scotch de peintre sur le vêtement) ou de signer la feuille d’émargement, et à ritualiser l’arrivée : «Comment vous appelez-vous ? Je vous invite à écrire votre prénom sur tel support.»
Pendant la formation
  • Introduire : Le cadre se pose dès le début de la formation à travers la présentation des objectifs, du programme, des horaires… 
  • Collecter les attentes : les attentes du groupe peuvent être collectées en amont ou au démarrage de la formation. Une synthèse de celles-ci est dans tous les cas essentielle car elle accuse réception des besoins individuels et permet de les valider.
    Le tour des attentes peut être réalisé de différentes manières : un tour de table classique avec une prise de note sur Paperboard, la rédaction de Post-it individuels puis un partage en grand groupe, la projection d’un diaporama, des présentations croisées, une frise des attentes qui évolue pendant la formation… Il est particulièrement important de faire le lien entre les attentes exprimées et le programme de formation.
    Exemple : le programme de formation est projeté et comparé aux attentes des participant·es, listées en amont sur des Post-it. Cela permet de visualiser les écarts potentiels entre le programme et les attentes. 
  • Coconstruire les règles du groupe : les règles, proposées en amont ou coconstruites, posent les conditions du vivre ensemble pendant ce temps partagé et répondent aux besoins des formateurs ou des formatrices et du groupe : s’écouter les uns les autres, faire preuve de bienveillance et de non-jugement, respecter les horaires, assurer la confidentialité des échanges… N’oubliez pas de préciser à quoi elles servent, de les faire valider par l’ensemble du groupe et d’expliciter le fait que le groupe, formateurs ou formatrices inclu·es, est responsable de leur application.
    Exemple. Une démarche participative peut consister dès le début de la formation à coconstruire les règles du groupe à partir des besoins identifiés de chaque personne sous forme de brainstorming autour de la question « De quoi avez-vous besoin pour que la formation se passe bien ? »

Voir Boîte à outils. Répertoire de techniques pour poser le cadre. Activité L’expression de nos besoins.
Les participant·es peuvent rencontrer des difficultés à conscientiser et à verbaliser leurs besoins individuels ou se sentir dérangés par la proposition consistant à partager des besoins considérés comme intimes ou privés dans un cadre professionnel (comme le besoin de reconnaissance). Dans ce cas, n’hésitez pas à adapter les modalités de travail (en les mettant en binômes par exemple) ou les activités proposées (mes besoins professionnels dans le cadre de cette formation). 

La souplesse du cadre. N’hésitez pas à faire évoluer le cadre, par exemple en modifiant les horaires de pause méridienne ou en identifiant de nouvelles règles de vie en cas d’incident. 
Exemple. Au début du deuxième jour de formation, les formatrices interrogent les participant·es : « Avez-vous des choses à ajouter par rapport à ce que l’on s’est dit hier sur les règles de vie du groupe ? Avez-vous des besoins particuliers ? » 

Selon les intentions pédagogiques, les règles collectives peuvent être discutées à plusieurs reprises dans le déroulé. Lors d’une formation en promotion de la santé qui aborde l’animation de groupe, cette séquence sur les règles peut ainsi être l’occasion d’adopter une posture réflexive sur l’utilité de les poser, sur la manière de procéder… De même, une mise en situation peut permettre d’identifier les règles sous-jacentes à la réussite d’une activité.
Exemple. Une approche de « mise en tension », consistant à déstabiliser le groupe pour prendre conscience de l’importance des règles (écoute, non-jugement, confidentialité, respect de soi, des autres et du matériel, disponibilité…), peut être proposée dans certains groupes qui se connaissent déjà.

Le rappel régulier du cadre. Il est essentiel de faire respecter et d’ajuster le cadre pendant la formation, voire d’y revenir. Comment faire si le groupe sort du cadre établi ?

  • L’interpeler en rappelant les règles collectives, par exemple : « Je m’autorise à vous rappeler de faire moins de bruit », « On avait convenu que… ». 
  • Afficher les règles collectives pour pouvoir demander au groupe, en cas de débordement, s’il est toujours d’accord avec ces principes.
  • Distribuer les rôles dans les groupes de travail (animateur, gardien du temps, secrétaire…) en veillant à expliquer que cela permettra une meilleure régulation du groupe. 
  • Ajouter des règles importantes pour vous (pas d’ordinateur/sortir en cas d’appel, par exemple). Le groupe n’a pas toujours conscience de l’importance de certaines règles. 

Un cadre respectueux de l’environnement
En plus de ces composantes, le formateur ou la formatrice en promotion de la santé inscrit ses actions dans une démarche de protection de l’environnement. Il ou elle veillera par exemple à : 
– Aérer la salle régulièrement lors des temps de pause pour diminuer la concentration en CO2 dans la pièce
– Réutiliser le matériel et choisir des matériaux durables (un tableau blanc plutôt que des Post-it, des dos d’affiches plutôt que des feuilles de Paperboard…)
– Privilégier des salles accessibles en transports en commun ou en vélo
– Tenter autant que faire se peut de se rendre à la formation en transports en commun, covoiturage ou à vélo
– Éviter la vaisselle jetable 
– Privilégier des produits alimentaires peu transformés (fruits frais ou secs, jus de fruits), locaux, de saison et, si possible, issus de l’agriculture biologique et commerce équitable (café, thé)
– Être vigilant à la cohérence des actions par rapport à la thématique de la formation.  
Exemple. Éviter les produits à forte empreinte carbone ou les produits traités chimiquement lors d’une formation sur la santé-environnement 
– Privilégier par exemple les pommes aux biscuits dans une démarche de qualité de l’alimentation 

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3 – Intégrer des temps d’inclusion et de déclusion

Il s’agit de deux étapes-clés de la dynamique de groupe :

Pendant l’inclusion, les individus se rencontrent, s’observent et apprennent à se connaître pour trouver leur place dans le groupe. Ils passent ainsi petit à petit de la méfiance à une certaine confiance. L’inclusion peut intégrer une ou plusieurs activités de type « brise-glace ». La déclusion est l’activité qui marque l’étape de séparation entre les membres du groupe.

Les formateurs et les formatrices peuvent choisir de ne pas participer aux activités pour se concentrer sur l’animation et la prise en compte de la dynamique du groupe. À l’inverse, leur participation signale l’instauration d’une relation horizontale.

L’inclusion

L’inclusion favorise de bonnes conditions d’apprentissage. Elle a un effet sur la motivation et permet de poursuivre les interactions initiées avec le groupe à l’accueil. Elle permet à chaque personne de :

  • Se sentir reconnue : qui je suis, d’où je viens, quelles sont mes expériences en lien avec le sujet de la formation…
  • Se sentir appartenir à un groupe : trouver des points communs personnels ou professionnels avec les autres (origine géographique, loisirs, compétences, publics, attentes…)
  • Ressentir du plaisir en passant un moment ludique et convivial

Pour le formateur ou la formatrice, l’inclusion sert à mieux connaître le groupe et à identifier ses caractéristiques. Un brise-glace permet d’initier la dynamique du groupe et de révéler d’éventuelles inquiétudes (voir Boîte à outils. Outil 1 : répertoire d’activités brise-glace).

Il est important en tant que formateur ou formatrice de se demander avec quelle activité brise-glace vous vous sentez le ou la plus à l’aise en fonction de votre personnalité. Le Centre des Nouvelles pédagogies de l’Université Grenoble Alpes s’est penché sur la question de manière humoristique en créant une affiche qui vous permettra de mieux choisir vos activités brise-glace selon votre profil : Télécharger l’arbre à palabres.

Le réveil pédagogique
On distinguera le brise-glace, qui a un objectif d’interconnaissance et de dynamisation du collectif, et les activités de type « réveil pédagogique » qui visent plutôt à se remobiliser en début de journée ou après la pause déjeuner, à réviser les éléments vus précédemment, à éviter l’assoupissement… (voir Boîte à outils. Outil 2 : répertoire d’activités de réveil pédagogique (ou energizer)

La déclusion

La déclusion conclut la formation. Elle symbolise la transition entre l’espace-temps de la formation et celui du retour au quotidien. Elle peut s’effectuer par le partage d’un mot individuel de bilan, par un clap collectif de fin… On distinguera la déclusion des séquences de bilan de fin de formation, qui ont plutôt pour objectif d’évaluer la satisfaction ou les apprentissages.

La formation de formateurs et formatrices
Lorsque vous vous adressez à de futur·es formateurs et formatrices, les temps d’inclusion et de déclusion servent à faire expérimenter aux participant·es des techniques qu’ils et elles pourront ensuite réutiliser dans leur travail. De même, si le formateur ou la formatrice souhaite que les participant·es puissent réutiliser ces techniques, il est judicieux de choisir des outils ou des techniques adaptées à leurs publics ou en lien avec la thématique de la formation. Il est alors important de bien clarifier les intentions pédagogiques des temps d’inclusion et de déclusion.

Les outils pour passer à la pratique :
OUTIL 8.  Les bonnes questions à se poser sur l’inclusion et la déclusion

 
Notre conseil : Privilégiez des activités peu engageantes initialement si le groupe ne se connait pas, ou si vous percevez des tensions ou des enjeux hiérarchiques. Ainsi, cela n’oblige pas les participant·es à révéler des informations personnelles ou délicates. Proposez toujours une issue (une autre manière de faire, un « joker »). 
Exemple : se présenter à partir d’un objet tiré de son sac ou de sa poche : les participant·es ont le choix de l’objet et sont donc responsables de ce qu’ils souhaitent partager avec le groupe. Cependant, cette activité peut être très impliquante dans certaines situations spécifiques qui ne sont pas toujours possibles à anticiper (par exemple, une participante présente son porte-clé et cela lui rappelle soudain une personne décédée et l’émeut). 

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2 – Permettre des temps informels de qualité

Qu’est-ce qu’un temps informel ?

Les temps informels sont nécessaires pour initier et maintenir une dynamique groupale. Ils ont un réel intérêt pédagogique et symbolisent la place qui est laissée au groupe pour exister en autonomie, en dehors de la relation entre le formateur ou la formatrice et les apprenant·es.
Exemple. Pour des raisons variées, des participant·es arrivent en retard le jour de la formation. Il est parfois préférable dans ce cas d’attendre que le groupe soit au complet et de commencer l’inclusion quelques minutes en retard, mais en accueillant individuellement chaque personne, plutôt que de commencer à l’heure en l’absence de certaines personnes. Pensez à la qualité des interactions à venir et prévoyez des marges horaires dans le déroulé pédagogique pour éviter un excès de stress !

Pourquoi proposer des temps informels ?

Les temps informels facilitent les échanges spontanés et la création de nouveaux liens en entretenant une atmosphère conviviale, propice aux échanges et à l’interconnaissance, et un sentiment d’appartenance.

Ensuite, ils facilitent les interactions informelles (rencontres, liens en dehors du cadre de la formation), ce qui favorise l’émergence d’un climat de confiance entre les participant·es. Ils répondent également à des besoins situés en dehors des temps de formation (repos, distraction, rêverie…), ce qui permet de maintenir un niveau d’énergie et d’attention élevés pendant la formation.

Ils permettent enfin de réguler les aléas tels qu’avoir du temps pour échanger en aparté avec un participant qui exprimerait des difficultés, réguler des tensions ou échanger avec une personne dont le comportement serait inapproprié par rapport au cadre mis en place.

Comment et quand laisser des temps informels ?

Il est essentiel de planifier ces moments dès la conception du déroulé pédagogique, de communiquer dessus avec les participant·es en amont et de questionner régulièrement le groupe pour les adapter.

En début de formation
  • Informer les participant·es : à l’avance et en début de formation, informer sur l’organisation des temps informels et les mettre en lien avec le lieu (voir Étape 2 : Le lieu de formation).
    Exemple. Indiquer la présence d’un self sur le lieu d’accueil de la formation ou de plateaux-repas livrés sur place ou d’espaces de restauration à proximité.
  • Identifier les espaces : une configuration claire des lieux amène un sentiment de sécurité : l’espace où je laisse mes affaires, celui de documentation, de pause, celui dédié au formateur ou à la formatrice…
  • Répondre aux besoins spécifiques du groupe : Par exemple, s’il y a des personnes qui fument, leur indiquer un espace extérieur.
Pendant la formation
  • Respecter les pauses annoncées : un temps d’accueil, une pause en milieu de matinée, une pause méridienne et une pause en milieu d’après-midi. Les temps de pause peuvent aussi être incorporés aux activités en sous-groupes, chaque groupe étant alors responsable de prendre une pause selon ses besoins.
Après la formation
  • Partager un moment de convivialité en fin de journée ou en fin de formation.

Les formateurs et les formatrices peuvent choisir d’être présent·es ou non pendant les temps informels.

Notons qu’il est important d’inclure les retours des participant·es concernant les temps informels (les points forts et les améliorations possibles) dans le processus d’évaluation (Voir Étape 6 : évaluer la formation).

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